
Contrat avec fuel incentive : une première
Bourbon Gabon vient de signer un contrat long terme de support à la production (tanker lifting, product supply, cargo...) pour 2 AHTS, les Bourbon Liberty 221 et 225. Signe particulier de cet accord : il est indexé à un objectif de consommation de fuel des navires. Une première pour BOURBON ! Les explications de Gildas Courau, Directeur Général de Bourbon Gabon.
PartnerShip : BOURBON n’avait encore jamais signé de contrat de ce type. Quel en est le principe et pourquoi avoir fait ce choix ?
Gildas Courau : Nous connaissons tous le contexte, un marché des OSV déprimé et des taux d’affrètement très bas dus à une surcapacité de navires. Nous avons donc entamé la réflexion suivante : qu’est-ce qui différencie nos navires de ceux de nos concurrents ? La réponse est simple : la propulsion diesel-électrique, qui équipe la majeure partie de notre flotte. Rappelons également que BOURBON possède 80% de la flotte diesel-électrique en shallow ! Ces navires consomment beaucoup moins que les navires à propulsion traditionnelle, et notamment nos Bourbon Liberty 200. Je crois qu’il n’y a quasiment pas de navires sur le marché qui consomment aussi peu. Nous tournons à moins de 5 m3 de fuel par jour quand les autres navires sont à 9 ou 10 m3. C’est un véritable avantage concurrentiel car, rappelons-le, ce sont les clients qui prennent en charge le fuel. Nous avons donc décidé de proposer au client un contrat avec « fuel incentive ». Cela signifie que nous nous engageons contractuellement sur des objectifs de consommation de fuel. Le taux d’affrètement est un peu plus bas mais si nous sommes plus performants que cet objectif de consommation, nous aurons un bonus de 5% sur le taux d’affrètement. Dans le cas contraire, nous aurons une pénalité. Voilà pour le principe général.
PS : Comment le client a-t-il reçu cette proposition ?
G.C. : Le client a immédiatement montré de l’intérêt pour ce principe novateur, et nous avons fait preuve de pédagogie pour qu’il perçoive au mieux le gain potentiel pour lui. Dans ce type de contrat, le plus important est de comprendre que le bonus potentiel accordé à BOURBON ne représente pas une augmentation des coûts pour le client. Si nous obtenons ce bonus, le taux d’affrètement sera certes plus élevé mais ce surcoût demeurera nettement inférieur au gain réalisé par les économies en fuel. Le client restera donc le principal bénéficiaire des économies réalisées. La notion de partage de gains est essentielle.
PS : Comment évaluez-vous la réussite de ce contrat ?
G.C. : Comme pour tout nouveau modèle, il a fallu évaluer les risques. Nous avons utilisé notre historique des opérations avec le client pour évaluer la consommation courante des navires. Nous ne nous sommes pas jetés dans l’inconnu. Pour l’instant nous sommes donc sur un contrat prudent qui sera, je l’espère, une première étape vers des contrats encore plus ambitieux. Dès le premier mois de contrat, nous pouvons constater que les équipages se sont fortement mobilisés pour tenir leurs objectifs. Les consommations des 2 navires ont considérablement diminué pour se placer à 4,5 m3 /jour pour l’un et 3,9 m3 /jour pour l’autre. Nous pouvons saluer le professionnalisme de nos marins ! C’est pourquoi je suis raisonnablement confiant sur le long terme, je pense que nous devrions atteindre notre objectif si tous les acteurs restent aussi impliqués.
PS : Vous pensez notamment à l’équipage ?
G.C. : Oui mais pas seulement. L’équipage des navires a bien évidement un rôle central, il a été fortement sensibilisé, notamment par les Contracts Managers, aux mécanismes qui nous permettront de réussir à atteindre nos objectifs. Les commandants ont les moyens de gérer au mieux la consommation de leur navire avec ODA1. Mais, et j’insiste sur ce point, c’est surtout un vrai travail d’équipe ! Pour que ça marche, tout le monde doit tirer dans le même sens - l’équipage, l’Operations Manager, le Contracts Manager - d’autant qu’il y a des relèves, des back-up, etc., nous devons être très vigilants sur le niveau d’information et d’engagement de tous les intervenants.
PS : Existe-t-il des discussions avec d’autres clients pour des contrats de ce type ?
G.C. : La consommation de fuel peut être difficile à évaluer sur un contrat totalement nouveau mais des discussions sont en cours avec le même client pour un contrat de ce type sur une autre zone géographique. Je suis par ailleurs en discussion avec d’autres clients pour ajuster modifier ou convertir des contrats en cours. D’ailleurs le principe de bonus-malus lié à la performance du taux de service pourrait également s’appliquer à des contrats surfers dans le futur. Mais à ce stade, être parvenu à cet accord est déjà un vrai succès, qui nous montre vers où nous devons aller.
1 ODA : Operational Data Application. Outil de reporting quotidien des données navire relatives notamment à la consommation de fuel.